« Penser à ne pas y penser m’amène à y penser et donc, j’y pense encore plus que j’y pensais. » Lorsqu’on y pense, le cerveau humain est impressionnant. Grâce à lui, nous vivons dans un monde où les innovations ne cessent de croître. Toutefois, les capacités d’introspection qu’offre le cerveau peuvent s’avérer être un cadeau empoisonné. Il nous arrive tous de nous perdre dans nos pensées et de nous questionner. Lorsqu’une préoccupation reliée à l’alimentation revient sans cesse, cela peut générer beaucoup d’angoisse et d’irritabilité. Les personnes vivant un trouble du comportement alimentaire (TCA) composent avec des préoccupations qu’elles ne parviennent pas à chasser de leur esprit. Dans ces cas, ces pensées deviendront une obsession.
Dans les TCAs, un besoin de contrôle peut s’installer rapidement dans l’alimentation. Lorsqu’une personne porte son attention à exercer un contrôle sur ses apports caloriques ou à bannir des aliments, elle crée l’effet inverse de celui voulu. La restriction ne fait que mettre l’interdit en relief et donc, crée une attraction pour ce que la personne souhaite éviter. Tant que cette restriction sera présente, l’envie d’y succomber sera fréquente.
« Ne pensez pas à un éléphant rose.
Je ne veux pas que vous vous imaginiez un éléphant rose.
C’est interdit.
Vous ne devez, en aucun cas, penser à un éléphant rose.
À quoi pensez-vous ?
À UN ÉLÉPHANT ROSE, ÉVIDEMMENT. »
Maintenant, si votre préoccupation envers votre alimentation ou votre image corporelle était cet éléphant rose que vous voulez tant éviter ? Est-ce que penser à ne pas y penser vous fait moins penser à ce dont vous ne devez pas penser ? Bien que les gens soient conscients de l’absurdité des pensées obsédantes, il n’en reste pas moins que l’emprise de ces idées sur la vie d’une personne vivant un TCA est insoutenable.
Lorsque le cerveau se met en branle et que les préoccupations deviennent obsession, il convient de trouver des outils pour mettre un frein à cet engrenage. Bien qu’il existe plusieurs outils, il faut en essayer plusieurs avant de remplir son sac à dos.
Dans mon sac à dos, je mets…
Telle l’image d’un sac à dos, notre bagage de viese compose de divers éléments tels notre éducation, nos expériences de vie et nos acquis. Bien entendu, on y retrouve aussi un coffre à outils comprenant nos forces individuelles, nos passions et nos moyens pour gérer les diverses émotions que nous vivons au quotidien.Ces ressourcespour faire face aux obsessions sont là, dans votre sac à dos ;il suffit de les connaître.
Afin d’éviter de fouiller dans ce sac lorsque les idées se font trop persistantes, un rappel visuel de ces outils pourrait vous aider. En ayant à portée de main une liste d’activités que vous aimez, vous pourrez vous changer les idées rapidement. Que ce soit bricoler, parler avec des amiEs, écrire ou prendre l’air, inscrivez-en plusieurs. Cette liste est à essayer àmaintesreprises avant de connaître la pleine efficacité de cet outil.
Lorsqu’une préoccupation persiste, il est difficile de verbaliser les émotions qui en découlent. Un journal créatif réunissant dessins, gribouillages et collages est un moyen original pour visualiser vos émotions lorsque les mots vous manquent. En alliant quelques mots à ce visuel, une interaction entre deux modes de pensées, soit intellectuel et émotif, permet d’interpeller votre être en entier. En plus de vous sortir de votre tête, ce journal sera un outil d’expression qui vous permettra de voir l’évolution de vos émotions.
Avez-vous déjà eu l’impression que votre cerveau bouillait tant il réfléchissait? Bien souvent, on oublie de prendre contact avec notre ressenti physique lorsque notre tête tourne à une vitesse affolante. Vous connaissez la méditation pleine conscience? En faisant le vide de votre esprit et en vous connectant à votre corps soit en prenant le temps de sentir le plancher sous vos pieds ou en vous concentrant sur la texture des objets que vous touchez, les obsessions prendront graduellement une part beaucoup moins importante de vos pensées. Habitez votre corps et le moment présent.
Un iceberg à explorer
Imaginez-vous un iceberg. Que voyez-vous principalement? La partie sous l’eau ou celle qui en émerge? Les TCAs sont exactement comme cette montagne de glace. La pointe de l’iceberg représente les comportements et les obsessions. La partie cachée sous l’eau représente les facteurs prédisposants et précipitants qui amènent une personne à développer un TCA comme stratégie de survie.
Dans cet amalgame d’éléments, on y retrouve les facteurs qui rendent les gens plus sensibles à développer un trouble alimentaire. Ces facteurs que l’on nomme « facteurs prédisposants » peuvent être socioculturels tels que la pression sociale et les standards de beauté véhiculés dans la société ou encore individuels tels que l’estime de soi et la santé psychologique, familiaux tels que la pression de bien performer et de bien paraître. Quant aux facteurs qui précipitent le trouble « facteurs »), on peut penser aux insatisfactions corporelles, aux échecs ou aux traumatismes. En ce sens, il n’existe aucun iceberg identique et donc, chaque personne est experte de son corps et de son processus de rétablissement.
Maintenant que votre sac à dos est rempli d’outils pour gérer les obsessions, la base de l’iceberg est à explorer. Les comportements et les obsessions sous-tendent un bagage émotionnel. En étant accompagné d’une personne de confiance et adéquatement outillée, cela vous aidera à vous connaître davantage. De plus, en allant chercher de l’aide, cela permettrait de briser l’isolement et de lâcher prise sur les pensées obsessives.
« Et si on faisait le vide dès maintenant? »
Melissa Guimond, administratrice et membre d’Arrimage Estrie